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Payer de présumées victimes d’agression sexuelle : ça arrive à chaque année chez Hockey Canada

Depuis que j’ai appris la nouvelle, je suis dégoûté. Doublement dégoûté même.

Dégoûté par les actions d’un hockeyeur ayant défendu les couleurs d’Équipe Canada et sept autres de ses collègues…

Mais aussi dégoûté par Hockey Canada qui a décidé d’acheter le silence de la présumée victime avec une entente à l’amiable (même si l’organisme refuse d’admettre qu’il a ainsi muselé la présumée victime). Utiliser des millions $ – qui proviennent soit de la poche de tes membres, soit des subventions gouvernementales, donc de nous, soit de la part de tes commanditaires – pour réduire au silence une présumée victime d’agression sexuelle, ça ne passe déjà pas à mes yeux (et à mes oreilles). Hockey Canada prétend avoir liquidé des placements pour payer la présumée victime, mais d’où provenait l’argent de ces placements, vous pensez ?

Mais le faire presque à toutes les années – parce que c’est ce qu’ont révélé de hauts dirigeants chez Hockey Canada hier en commission parlementaire -, ça me dépasse. Et pas dans le bon sens du terme!

Quand tu répètes constamment quelque chose (parole, comportement, etc.) en tant qu’entreprise ou organisme, on peut doit dire que ce quelque chose fait partie de ta culture organisationnelle. Bref, payer une présumée victime d’agression sexuelle pour qu’elle se taise est quelque chose qui n’a rien d’anormal chez Hockey Canada, malheureusement…

Relisez cette dernière phrase sans avoir des maux de cœur…

Je ne reviendrai pas sur l’histoire. D’excellents journalistes qui la couvrent le font de façon exceptionnelle. Rick Westhead (CTV) et Ken Campbell le font de main de maître.

Mais je tiens tout de même à souligner quelques trucs intéressants décr*ssants.

1. La fédération a été incapable d’identifier les huit joueurs qui auraient été impliqués dans l’histoire de viol, devenue un viol collectif en l’espace de quelques minutes. Bref, ils ont – directement ou indirectement – acheté le silence d’une présumée victime sans avoir pu identifier ses présumés agresseurs ? Je de la (grosse) difficulté à croire ça. Pas vous?

On nous dit qu’une enquête supposément indépendante de la part de Hockey Canada qui aura duré 26 mois et qui n’aura pas permis d’identifier les fautifs…


2. Cette présumée agression sexuelle se serait produite en 2018. Ça aura pris quatre ans avant qu’un journaliste (Rick Westhead) la débusque et la rende publique. Sinon, on n’en aurait jamais entendu parler.

3. Autant Scott Smith, président et chef de l’exploitation chez Hockey Canada, que Tom Renney, chef de la direction, ont plutôt mal paru hier devant les élus à Ottawa.

4. Selon Tom Renney, la plaignante n’aurait pas participé à l’enquête. Voyons donc !

5. Toujours selon Renney, seulement quatre à six joueurs ont collaboré à l’enquête. Voyons donc !

Scott Smith a pour sa part affirmé que 12 ou 13 joueurs avaient participé à l’enquête. Qui dit vrai ? Tous les gens potentiellement impliqués dans une telle histoire ne devraient-ils pas collaborer à l’enquête à la base ?

6. Un député fédéral du Bloc Québécois a même été jusqu’à accuser Hockey Canada d’avoir été complice dans cette affaire.

7. Tom Renney a affirmé n’avoir jamais reçu le rapport complet de l’enquête. Comment a-t-il donc pu en venir à la conclusion – après trois semaines, si je comprends bien – que Hockey Canada devait verser des millions $ à la présumée victime ? C’est tout croche !

8. Au total, Hockey Canada a laissé savoir qu’il y aurait eu une douzaine de cas semblables au cours des dernières années et qu’il y aurait encore encore deux enquêtes en cours. D’autres victimes ont déjà bénéficié d’ententes similaires.

« Il y a encore deux cas qui font l’objet d’enquêtes et dont il ne m’est pas permis de discuter ici. On m’a aussi indiqué que dans les cinq ou six années précédant mon arrivée en poste, deux ou trois situations semblables par année ont été rapportées et réglées de la même façon. Mais une seule au cours des 12 derniers mois. »Scott Smith, président chez Hockey Canada


9. Aucun des huit agresseurs présumés n’a eu à verser un seul dollar à la victime. Au final, ceux-ci n’ont donc eu AUCUNE conséquence.

Rappelons que la plaignante prétend avoir été agressée à plusieurs reprises dans la nuit du 18 et du 19 juin 2018 dans le cadre d’une soirée organisée par la Fondation Hockey Canada.

« Selon le procès, les joueurs lui ont ordonné de caresser leurs organes génitaux et de leur faire une fellation. Les joueurs auraient également chevauché la plaignante tout en plaçant leurs organes génitaux sur son visage, ils auraient giflé la plaignante sur ses fesses, craché sur elle, éjaculé en elle et sur elle, eu des rapports vaginaux avec elle, l’ayant empêchée de quitter la pièce alors qu’elle essayait de s’en sauver […] Parfois, la plaignante pleurait et tentait de quitter la pièce mais a été dirigée, manipulée et intimidée pour qu’elle reste, après quoi elle a été victime d’autres agressions sexuelles. »allégations au tribunal, telles que rapportées par le site HabsEtLNH

Je suis sincèrement TRÈS dégoûté. Autant par le comportement de ces jeunes hockeyeurs qui s’en sortent (pour l’instant) sans la moindre tape sur les doigts que par la complicité de Hockey Canada. Est-ce si important et acceptable que ça, gagner à tout prix? N’a-t-on pas appris de ce qui s’est passé chez les Blackhawks au cours des dernières années? De toute la saga causée par la sélection de Logan Mailloux à Montréal?

La culture collective en matière de respect et de comportements sexuels de nos sociétés doit changer. Elle a commencé à le faire, mais elle doit continuer d’évoluer.

Pour ce faire, la culture du milieu du hockey – en commençant pas celle de l’organisme qui chapeaute toutes les activités hockey au Canada – doit arriver au 21e siècle. Ils sont en retard de 22 ans. Ils doivent rattraper ce retard d’un coup sec. Go ! Changez !

Je vous laisse sur cet autre excellent texte de Martin Leclerc. Difficile de trouver meilleur résumé/analyse de l’affaire…

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