Ahhhhh, le bon vieux printemps 2022…
À 17 ans, Juraj Slafkovsky venait d'être nommé MVP des Jeux olympiques après y avoir inscrit 7 buts en 7 matchs, aidant la Slovaquie à décrocher la médaille de bronze. Plusieurs beaux tirs de l'enclave, quelques séquences intéressantes en contrôle de rondelle…
Ce fut assez pour commencer à parler de lui comme un sérieux rival pour Shane Wright à titre d'éventuel premier choix au total.
Puis, il y a eu le Championnat du monde en mai, une compétition encore plus relevée que les Olympiques, incluant plusieurs joueurs de la LNH (entre autres, Mathew Barzal, Drake Batherson, Nico Hischier, Mikael Granlund, Timo Meier, Tomas Tatar et Dylan Cozens).
Une fois de plus, c'est le jeune Slafkovsky, à peine 18 ans, qui fut le meilleur joueur de son pays, avec 9 points en 8 matchs.
On se rappelle encore de quelques séquences où il transportait la rondelle avec autorité depuis son territoire jusqu'en zone adverse, déjouant au passage 2-3 joueurs. Spectaculaire et autoritaire.
dude 😎 #Slafkovsky pic.twitter.com/TIzFkAvqMx
— sona (@ronliin) May 20, 2022
Alors que mes visionnements de Shane Wright dans la OHL me décevaient me laissait toujours sur mon appétit, la façon avec laquelle Slafkovsky parvenait à laisser son empreinte sur ces matchs internationaux, sa volonté de faire la différence avec et sans la rondelle, à se lever quand ça comptait le plus, m'avait grandement impressionné.
Dans mon esprit, il n'était pas des milles devant Wright et Cooley, mais entre les trois, le vrai top dog de 2022 c'était lui.
Et c'est surtout lui qui me semblait le choix optimal pour le « petit » CH, celui en qui j'avais le plus confiance sur un horizon de cinq ans et sur un horizon de carrière avec le Canadien.
Et les dirigeants du CH en sont manifestement arrivés à la même conclusion quelques semaines plus tard lorsqu'ils l'ont appelé sur l'estrade en plein Centre Bell, au risque d'en froisser plusieurs sur place portant déjà fièrement un chandail de… Shane Wright!
Sans grande surprise, le colosse de 6'3, 238 lbs, a débuté sa carrière dans la LNH à 18 ans sous la supervision de Martin St-Louis et Adam Nicholas.
Ça demeurait une décision discutable.
Après tout, bébé Slaf avait encore une confiance à bâtir au niveau professionnel et bien des choses de base à travailler, dont jouer la tête plus haute, lui qui s'est fait « ramasser » à quelques reprises au cours de cette première saison écourtée par une blessure au genou.
Slaf essayait parfois de faire de jeux avec la rondelle, mais à 18 ans, dans la LNH, on n'avait pas vraiment été en mesure de revoir le joueur dominant de la saison précédente avec Slovaquie.
Ce n'est qu'en deuxième moitié de la saison 23-24 qu'on a pu voir un Slafkovsky plus confiant, constant et efficace dans un rôle plus précis. Aux côtés de Caufield et Suzuki, « le Gros » remportait maintenant ses bagarres le long des rampes, repérait ses coéquipiers avec de belles passes en plus de marquer sa part de buts près du filet adverses.
À sa saison de 19 ans, Slaf a donc enregistré tout près d'un point par match en seconde moitié. On notera aussi ses 14 points en avantage numérique, 50 points en tout. Pas mal.
Tous les espoirs étaient maintenant permis. Une campagne de 65-70 points semblait alors une très forte possibilité à 20 ans en 24-25.
Mais un début de saison couci-couça, où on l'a entre autres fait jouer 21 matchs entre la fin octobre et le début décembre sans ses partenaires habituels, a semblé lui faire perdre ses repères.
St-Louis avait tenté d'en faire le joueur qui allait relancer Kirby Dach et qui allait devenir la locomotive du deuxième trio. Ça a fait patate. D'ailleurs, personne ne semblait en mesure de relancer Dach en 24-25. L'Albertain n'était tout simplement pas assez en forme pour suivre le rythme de la LNH.
Mais, de retour avec Caufield et Suzuki, tout est une fois de plus rentré dans l'ordre pour Slaf en deuxième moitié et il a terminé la dernière saison avec 51 points, un de plus que la saison précédente, malgré 4 point de moins en avantage numérique (10).
Somme toute, pas une véritable progression, du moins pas au plan offensif.
À l'aube de sa quatrième saison, une saison souvent déterminante pour les attaquants de son gabarit, on était donc encore en droit de s'attendre à ce qu'il passe enfin au prochain niveau en 25-26.
Toujours aux côtés de Suzuki et Caufield, les 15-20 premiers matchs nous ont remontré le gros ailier utile à ses deux comparses, gardant souvent le jeu en vie en zone adverse, remportant des batailles, volant des rondelles, prenant de la place, créant de l'espace, etc.
Même si on l'aurait aimé un peu plus constant et impliqué certains soirs, Slaf jouait généralement bien, et avec un peu plus de chance, il aurait facilement pu accumuler 5-6 points de plus à sa fiche, dont 2 buts qu'il semble avoir marqué sur des déviations contre Chicago et Columbus que la LNH ne lui a jamais crédités.
Mais, à travers tout ça, on ne voyait toujours pas le joueur incisif, dominant et créatif avec la rondelle que le Canadien avait repêché.
Ce joueur pouvait-il réellement exister dans la LNH, où n'était-ce qu'une vue de l'esprit, un fantasme?
Voulant sans doute rééquilibrer ses trios en brassant la proverbiale soupe, Martin St-Louis a récemment inséré son gros #20 aux côtés de sa superbe recrue, Ivan Demidov, et du surprenant Oliver Kapanen.
Voulait-il aussi voir à nouveau ce que Slaf avait dans le ventre comme « locomotive » – et cette fois-ci « vétéran » – sur ce jeune deuxième trio?
Peut-être…
En tout cas, c'est à cette occasion qu'on a enfin revu le vrai Slafkovsky, celui qui à son année de repêchage, pouvait nous rappeler un mélange de Jaromir Jagr et de Marian Hossa : un gros ailier talentueux capable de driver son trio, de transporter et protéger la rondelle, de créer des jeux pour ses coéquipiers.
Juraj Slafkovský hits the spin cycle, then feeds Ivan Demidov 🔄 pic.twitter.com/yBe5jB3nS6
— Sportsnet (@Sportsnet) November 29, 2025
On l'a donc vu contre les Jets prendre charge avec la rondelle un peu partout sur la patinoire, aucunement hésitant et beaucoup moins prompt à remettre la rondelle à Suzuki et Caufield.
On l'a aussi senti plus confiant et à l'aise, devant le but en supériorité numérique dans le rôle de « bumper ». Après 26 matchs, Slaf a d'ailleurs déjà égalé sa marque personnelle de 6 buts en power play en une seule saison. Il s'agit là d'un indicateur assez probant de très belles choses à venir…
Juraj Slafkovsky PP goals:
6 — 2025-26
5 — 2024-25
6 — 2023-24
1 — 2022-23Still has 56 games left to play. pic.twitter.com/AWtf4JS5ff
— Canadiens Muse (@Canadiens_Muse) December 4, 2025
Juraj Slafkovsky roule à un rythme de 28 buts et 151 mises en échec, jusqu'ici.
Il a 21 ans.
L'an passé, qui a fait ça? Trois bêtes.
Trois bêtes de plus de 25 ans.
Patience. Patience. Patience. https://t.co/1QEkYrYAg9 pic.twitter.com/uBcnxR6QRK
— Anthony Martineau (@Antho_Martineau) December 6, 2025
Mais, si voulez mon avis, je crois que cette cadence pourrait s'intensifier, lui qui, après avoir connu une séquence de 5 buts en 7 matchs à la fin octobre, début novembre, vient d'en inscrire 3 à ses 4 derniers matchs.
Slafkovsky commence à peine à réaliser à quel point il a maintenant l'expérience (226 match à 21 ans!) et tous les outils pour devenir un joueur dominant soir après soir dans cette ligue.
Ne lui manquait peut-être que cette petite dose supplémentaire de confiance que son séjour aux côtés de Demidov lui a procurée.